Saint Païssy Velitchkovsky: Le Parchemin/ Six Chapitres sur la Prière Mentale (VII)
Pour confirmation (de ce que je viens d’avancer) et pour donner une assurance indubitable à ceux qui auraient encore un doute à ce sujet, comme s’il s’agissait d’une chose inconnue et dont personne n’ait témoigné, il est temps maintenant de montrer quels témoignages sont apportés dans l’Ecriture Sainte, selon les oeuvres des Saints Pères qui ont écrit sur l’illumination de la Grâce.
La Divine prière mentale a sa fondation inébranlable dans les paroles de Notre Seigneur Jésus-Christ : „Mais toi, quand tu pries, entre dans ta chambre et quand tu as fermé ta porte, prie ton Père qui est dans le secret ; et ton Père qui te voit secrètement te récompensera ouvertement” (Mat. 6:6). Ces paroles comme nous l’avons déjà dit dans le premier chapitre, sont interprétées avec l’aide de la sagesse de Dieu par le flambeau du monde, saint Jean Chrysostome, comme faisant allusion à une prière non vocale, secrète, prononcée des profondeurs du coeur, apportant comme témoignage de la Sainte Ecriture, Moïse le théopte, et sainte Anne mère du prophète Samuel, et le Juste Abel et son sang qui criait des profondeurs de la terre – disant que dans leurs prières sans paroles, ils furent entendus par Dieu. Ce Grand Maître de l’Univers, ces lèvres du Christ, je veux dire saint Jean Chrysostome a aussi donné séparément, en trois homélies un enseignement concernant cette Divine prière, comme cela est indiqué dans le témoignage sincère du Bienheureux Archevêque de Thessalonique, dans le chapitre 294 de son livre que toute l’Eglise Catholique Orientale tient en vénération comme un pilier et une confirmation de la vérité.
Le pilier et les lèvres de feu du Saint Esprit, l’œil de l’Eglise, Basile le Grand, en expliquant le passage de la Sainte Ecriture : „Je bénirai le Seigneur en tous temps, Sa Louange sera toujours sur mes lèvres” (Ps 33: 1) nous enseigne d’une manière excellente ce que sont les lèvres spirituelles et les activités de l’intellect, c’est-à-dire de la prière mentale, apportant pour ce fait des témoignages de l’Ecriture Sainte, et je présente ici et maintenant ses propres paroles, remplies de Sagesse Divine : „Sa louange sera toujours sur mes lèvres. Il semble que le Prophète parle de quelque chose d’impossible: comment la louange de Dieu peut-elle être toujours sur les lèvres humaines ? Quand un homme parle au cours de conversations terrestres ordinaires, il n’a pas sur les lèvres la louange de Dieu ; quand il dort, il est totalement silencieux; et aussi quand il mange et boit, comment ses lèvres peuvent-elle prononcer une louange ? A ceci nous répondons qu’il existe certaines lèvres spirituelles de l’homme intérieur par lesquelles il est nourri, participant à la vie du Verbe, qui est „le pain qui descend du ciel” (Jean 6 : 33). C’est précisément de ces lèvres que parla le prophète: „J’ouvris mes lèvres et j’invoquai l’Esprit” (Ps. 118. 131). C’est à cela que le Seigneur nous éveille, afin que nous tenions ces lèvres ouvertes assez grandement pour recevoir la nourriture véritable, quand Il dit : „Ouvre tes lèvres et je les emplirai”, (Ps. 80 : 11). De là, la pensée de Dieu une fois gravée sur ces lèvres et confirmée par l’entendement de l’âme, peut être appelée la louange de Dieu qui est toujours dans l’âme. Et selon la parole de l’Apôtres quelqu’un qui est vigilant peut tout faire pour la gloire de Dieu, de telle sorte que toute action et toute parole et toute activité de l’intellect est assimilée par sa signification à la louange. Que l’homme vertueux mange ou boive et quoi qu’il fasse, il le fait entièrement pour la gloire de Dieu (1 Cor. 10 : 31). Ainsi même quand il dort, son coeur reste vigilant.” Ainsi parle saint Basile. Et dans ses paroles, il est clair qu’à côté des lèvres du corps, il y a aussi les lèvres de l’intellect, et il y a un travail et une louange mentales incessantes dans l’homme intérieur.
Le très semblablement Bienheureux, le soleil égyptien – on plutôt universel – qui a brillé de tout l’éclat des dons inexprimables du Saint Esprit, l’homme céleste -, je veux dire Macaire -, dans ses paroles célestes concernant cette sainte prière parle ainsi : „Un chrétien doit toujours se souvenir de Dieu”, car il est écrit : „Tu aimeras le Seigneur ton Dieu avec tout ton coeur” (Matt, 22 : 37). Il doit aimer Dieu non seulement quand il entre dans le temple de prières, mais aussi quand il marche, quand il parle, quand il mange, et boit, qu’il se souvienne de Dieu, de l’amour et de la prière; car Il dit : „Là où est votre trésor, votre coeur sera lui aussi” (Matt. 6 : 21), etc…
Le saint Père théophore de jadis, Isaïe l’ermite, à propos de cet enseignement caché, c’est-à-dire celui de la prière de Jésus, apporte ce témoignage tiré des paroles de la Sainte Ecriture : „Mon coeur brûlait en moi et dans ma méditation surgit une flamme” (Ps. 38 : 4).
Saint Siméon dont il est question dans le livre déjà mentionné du très Bienheureux Siméon de Thessalonique, et qui au sein de la cité impériale (Constantinople), brillait comme un soleil par la prière mentale dans les dons ineffables du Très Saint Esprit, et en conséquence est appelé par l’Eglise entière le Nouveau Théologien, dans son Homélie sur les trois formes de la prière, écrit ceci à propos de la prière mentale et de la vigilance : „Nos Saints Pères, entendant le Seigneur dire „Du coeur procèdent les pensées mauvaises, les meurtres, adultères, fornications, vols, faux témoignages, blasphèmes et ce sont ces choses qui souillent l’homme” (Matt 15: 19-20) ; et aussi l’entendant enseigner qu’il faut nettoyer ce qu’il y a à l’intérieur de la coupe et du plat, pour que l’extérieur en soit propre aussi (Matt. 23 : 26), ils abandonnèrent tout autre tâche et œuvrèrent seulement à cette garde du cœur, sachant d’une manière indubitable que par cette pratique, ils garderaient également toute autre vertu sans difficulté – Sinon, il est impossible qu’il existe une seule vertu”. – Ces paroles du saint, indiquent que les Saints Pères considéraient les paroles déjà citées du Seigneur comme un témoignage et une fondation pour eux mêmes de la garde du cœur, qui est l’invocation mentale de Jésus [avec l’intellect dans le cœur]. Ce saint avance aussi d’autres passages de la Sainte Ecriture comme témoignages en faveur de cette Divine prière mentale, en disant : „L’Ecclésiaste parle ainsi : „ô Jeune Homme, dans ta jeunesse réjouis-toi et va sans souillures selon ton coeur, et extirpe la colère de ton coeur (Eccl. 11 : 9-10) et : „si l’Esprit du Seigneur vient sur toi, ne quitte pas ta place” (Eccl. 10 : 4). Par place, il entend le cœur, comme l’a aussi dit le Seigneur „Du coeur procèdent les pensées mauvaises” (Matt. 15. 19). Et encore : „Ne sois pas hautain” (Luc 12: 29) (c’est-à-dire ne dissipe pas ton esprit). Et encore : „Etroite est la porte, et resséré le chemin qui conduit à la vie” (Matt. 7 : 14) de même : „Bienheureux les cœurs purs” (Matt. 5 : 8) c’est-à-dire ceux qui n’ont pas une seule pensée terrestre”. Et l’Apôtre Pierre dit : „Sois sobre, sois vigilant, parce que ton adversaire le démon comme un lion rugissant, marche à l’entour, cherchant quelqu’un à dévorer” (1 Pier. 5 : 8). Et l’Apôtre Paul écrit clairement aux Ephésiens à propos de la garde du cœur : „Nous ne nous battons pas contre la chair et le sang, mais contre les principautés, contre les puissances, contre les dirigeants des ténèbres de ce monde, contre les esprits malins des régions célestes” (Eph. 6: 12).
Saint Hésychius le Presbytre, théologien et maître de l’Eglise de Jérusalem, ami et intime de notre Père Théophore Euthyme le Grand, qui disserta avec une sagesse divine sur l’illumination de la grâce divine, en un livre de 200 chapitres à propos de cette invocation mentale sacrée de Jésus de l’intellect dans le coeur, c’est-à-dire à propos de la prière mentale, avance encore à ce sujet les témoignages suivants de l’Ecriture Sainte „Bienheureux les cœurs purs, ils verront Dieu” (Matt. 5 : 8) de même „Prends garde qu’il n’y ait en ton cœur une parole inique cachée” (Deut. 15 : 9) de même : „Le matin je me tiendrai devant Toi et Tu me verras” (Ps. 5: 4) ; de même : „Bienheureux celui qui saisit et fracasse tes petits enfants sur le roc” (Ps 136: 9) ; de même : „Chaque matin j’anéantirai tous les méchants du pays pour retrancher de la ville du Seigneur tous ceux qui commettent l’iniquité” (Ps. 100 8), de même : „Sois préparé, ô Israël à prononcer le Nom du Seigneur ton Dieu” (Amos 4 : 12) ; et l’Apôtre „Priez sans cesse” (1 Thes. 5 : 17) ; et le Seigneur Lui-même dit : „Sans Moi, vous ne pouvez rien faire. Celui qui demeure en Moi, et Moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruits. Si un homme ne demeure pas en Moi, on le jette comme un sarment” (Jean 15 : 5-6) de même „du cœur procèdent les pensées mauvaises, meurtres, adultères… Ce sont ces choses-là qui souillent un homme” (Matt. 15: 19) ; de même : „Je me réjouis d’accomplir ta volonté, ô mon Dieu, oui, Ta loi est dans mon cœur” (Ps. 39 : 9) ; et d’autres citations encore que j’omets à cause de leur multitude.
Notre divin Père théophore Jean Climaque, apporte, lui, ce témoignage de l’Ecriture Sainte concernant cette prière sacrée et le silence véritable de l’intellect : „Le grand habitué de cette prière grande et parfaite a dit : „Je préfèrerais dire cinq paroles avec mon intellect”* (1 Cor. 14 : 19) etc… et encore : „Mon coeur est prêt, ô mon Dieu, mon coeur est prêt” (Ps. 56 : 8) et de même : „Je dors mais mon coeur veille” (Cantique des Cant. 5 : 2) de même : „Je criais de tout mon cœur” (Ps. 118 : 145), c’est-à-dire avec le corps et l’âme ; etc…”
Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après
THE SCROLL
Containing
SIX CHAPTERS ON MENTAL PRAYER
By Our Father of Blessed Memory [saint]
STARETZ PAISIUS VELITCHKOVSKY
Orthodox Word
Saint Herman of Alaska Brotherhood,
Platina,
California, USA
1972
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(Gravure de saint Païssy:
Dominique Aymonier-Lopez)
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